News about events and exhbitions regarding the french artist Valéry Grancher

mercredi 26 novembre 2008

ITW art and you

I have the pleasure to announce that the website http://www.art-and-you.com has done a great itw regarding me and my last exhibition in Paris (in french):

"Vous vous êtes fait connaître grâce à Internet, qui reste toujours au cœur de votre pratique artistique. A l’époque, vous étiez considéré comme un artiste du Net art. Qu’en est-il maintenant ? Où vous situez-vous par rapport au Net art ?

Le Net art a été un mouvement anarchiste et spontané, monté par une bande de copains, qui à l’époque, n’ambitionnait pas d’être dans le monde de l’art. On utilisait des références artistiques sur le Net pour tourner en ironie ce qui se passait à l’époque dans le monde de l’art. Puis notre pratique au travers des échanges avec Vuk Cosic, Olia Lialina, Jodi, etc., a commencé à devenir de plus en plus « arty ». On s’est pris au jeu, on est devenu de plus en plus sérieux. On avait ouvert une porte, il fallait l’assumer. Je me suis senti responsable, et j’ai beaucoup travaillé sur la promotion du Net art dans le monde institutionnel. C’est comme ça que j’ai réalisé la première vente à la Fondation Cartier, dès fin 1997. En 1998, j’ai entamé des négociations avec le Berkeley Art Museum Pacific Film Archive pour une expo personnelle. Ca commençait à tourner très sérieusement.
Dès 1998, une forme d’académisme du Net art est née. Des artistes de seconde génération reprenaient la notion de quiz par email, remplaçaient une question par une autre alors que nous l’avions fait pendant trois ans. Ca nous a donné un reflet négatif, qui nous a poussé à déclarer la mort du Net art en 1998.
Pour nous, le Net art, c’était une énergie. C’était performatif, un mouvement qui n’avait pas de pérennité. On a poussé la réflexion jusqu’au bout et on s’est dit « voilà, c’est fini ». D’autant plus qu’au départ Internet était un terrain libre, et qu'à partir de 1998 c’est devenu une galerie marchande. Le Net art « découverte des Amériques » où tout était vierge et où on était des trappeurs, c’était fini. Tout s’est officialisé, c’est devenu institutionnel. Les musées ont eu leurs sites, les galeries aussi. Ca n’avait plus vraiment de pertinence.
Maintenant, ça fait presque dix ans qu’on est entré dans le XXIème siècle. Le monde tel qu’il est aujourd’hui ne correspond nullement à ce qu’il était au milieu des années 90. Et donc aujourd’hui faire des jeux d’écran en html ou en java, ou des animations flash, ça ne veut plus dire grand chose. Il faut dépasser ce travail.
Internet est certes à l’origine de ma reconnaissance, mais ce n’est qu’un outil parmi d’autres. Et vu que je maîtrisais déjà d’autres médias, j’ai continué à faire des installations vidéo, au même titre qu’étant peintre, en 1998, il m’est venu l’idée d’hybrider la peinture et Internet. Différents Net artistes ont commencé à hybrider le virtuel et le physique ; c’est ce qui m’intéresse aujourd’hui.


Le web painting n’est donc pas du Net art.

En effet, le web painting assume l’héritage du Net art, mais ce n’est plus vraiment du Net art. C’est une sorte de continuité, au même titre que Fluxus par exemple. Robert Rauschenberg faisait des performances, des ombres sur des toiles blanches, avec John Cage notamment. Ils ont hybridé leur travail pour en faire quelque chose de nouveau. Et moi, venant de la peinture, ce qui me paraissait important c’était justement de dépasser mon travail, et de dépasser aussi la peinture en l’utilisant comme média.

Parlons un peu de votre actualité artistique. Vous venez d'exposer à la galerie Incognito vos nouvelles créations, et notamment des sculptures à partir de Lego. Que représentent ces œuvres, et pourquoi des Lego ?

C'est totalement nouveau et ce sera très bref. C'est un travail très ponctuel par rapport à un moment, une époque, et un lieu.
Pourquoi le jeu de Lego ? Tout simplement parce qu'on est à l'époque du Web 2.0.

En novembre 2007, Google, Myspace, Facebook, et quelques autres ont signé une convention pour normaliser des standards exploitables par tous les réseaux sociaux. Ca passe par la standardisation de brick logiciels, développés sur une architecture très précise, basée sur du Java.

Pour simplifier, le Web 2.0, c'est comme un jeu de légo. Ce sont des briques que l'on assemble et que l'on standardise.

Il se trouve que cette année, c'est le cinquantenaire des jeux Lego. J'y ai joué gamin, et quand on m'a demandé de faire une exposition à la galerie Incognito, qui est un tout petit lieu, j'ai pensé à faire un petit format. Cette galerie elle-même est considérée comme l'unité minimale de ce que peut être une galerie : pas de galeriste, une carte à puce pour rentrer, le strict minimum pour la déambulation d'une personne entre quatre murs. C'est aussi une pièce Lego de ce que peut être une galerie.


Vous utilisez souvent des médiums assez classiques (la peinture et la sculpture), en rapport avec quelque chose de beaucoup plus technologique (Internet et les techniques informatiques). Que voulez-vous signifier dans ce rapport entre médiums classiques et technologiques ?

Aujourd'hui, on n'est plus dans la modernité, on n'est plus dans la post modernité, on n'est plus dans la notion de révolution et de rupture. On assume un héritage qui va au-delà du XXème siècle.
Si on prend l'exemple de Koons à Versailles, on se rend compte qu'il crée dans une référence qui n'est pas celle du XXème siècle. Son vocabulaire est référencé sur une forme d'art baroque qu'il connaît très bien. Le homard de la salle de Mars et la salle rouge du dieu de la guerre, font écho au portrait de Louis XIV qui se trouve derrière, sa cuirasse de guerre comme la carapace d'un homard. Dans la pièce, une nature morte représente un homard. Ce sont des liens qui se créent et dépassent l'art contemporain.
Cette hybridation du classique et de l'ultra-technologique renvoie pour moi à quelque chose de très précis dans la tradition qui peut remonter jusqu'à la Renaissance, avec notamment les travaux de Piero della Francesca, la mise en perspective, la réflexion sur la représentation mathématique du monde.

Aujourd'hui, nous sommes dans une période de synthèse. C'est ça qui m'intéresse. Certes, une google painting c'est une peinture, réalisée de manière assez classique, mais néanmoins en tant qu'objet-peinture, c'est troublant. Et c'est toute ma préoccupation.

Pourquoi n'est-on plus dans la modernité ? Parce que justement il n'y a plus de projection dans le futur, on est dans le présent. Et pourquoi n'y a-t-il plus de projection dans le futur ? On le voit bien, on n'est plus à l'époque des futuristes où il y avait des perspectives d'évolution technologique, idéologique, politique, le programme d'un monde meilleur. Aujourd'hui, on se demande « qu'a-t-on fait au monde ? ». Toutes les utopies ont été abattues. Toutes les barrières, tous les fantasmes scientifiques sont devenus concrets, et finalement on se recentre sur l'humain et l'émotion. La XXIème siècle est devenu beaucoup plus religieux. On n'a jamais vu une présence catholique aussi forte en France, au même titre que dans les pays du Maghreb la présence musulmane n'a jamais été radicalisée. Ca se durcit de tous les côtés. Le monde change dans ce sens, et moi ça me questionne.


Entre le XXème et le XXIème siècle, on observe un changement dans votre pratique artistique, moins immatérielle, un autre regard sur le monde. Quel a été le facteur déclenchant ?

Je vais dire quelque chose d'assez new age, mais tant pis. Je le dis parce que c'est quelque chose que j'ai vécu et qui a été un révélateur. J'ai terminé ma première google painting le 10 septembre 2001. Je vernissais le 11 septembre 2001 à Los Angeles. Or, le 11 septembre à Los Angeles à 8h du matin, nous avons été évacués de façon violente du centre ville de Los Angeles, en nous disant que nous étions bombardés, que c'était Pearl Harbour. J'ai atterri devant une télé où j'ai vu les tours se prendre le deuxième avion et le tout s'écrouler en temps réel.
la vigie

Quand je suis arrivé à New York en novembre, j'habitais à un block de ground zero et il y avait des odeurs de viande grillée qui flottaient dans l'air en permanence. Ca a été un choc parce que pour moi, le 11 septembre a été le syncrétisme, la collusion de deux choses : de l'archaïsme le plus violent et de la technologie la plus radicale. Des objets High-Tech, détournés de façon totalement archaïque avec des cutters, sont devenus des bombes qui ont fait s'effondrer un système financier. Ce repli archaïque très brutal est devenu pour moi le symbole d'une nouvelle forme de terrorisme. Et à partir de ce moment là, je me suis énormément questionné sur mon travail. A l'époque, je n'avais qu'une pratique virtuelle. Je commençais à peine à hybrider avec le physique. C'est là que j'ai ressenti le besoin de penser un projet plus vaste à l'échelle de la planète.

... Dans cet esprit, vous travaillez sur un triptyque : trois voyages, trois aventures. Vous avez déjà été en Haute Amazonie et à 800 kilomètres du pôle nord. Il vous reste à affronter le toit du monde, le mont Everest. Que vous apportent ces expériences ?

Avec ce triptyque, je pose la question des limites de notre monde. Aujourd'hui, il n'y a plus de périphérie, tout est dans tout. Quand on va en Equateur, on pense être au delà de l'Occident. Mais au delà de l'Occident, ils ont le Web, et ils ont Google map. Et quand on pense être au sommet du monde, on se trouve dans un hyper occident où toutes les nations sont présentes à s'observer en chien de faïence pour savoir qui va forer le premier. La grande hypocrisie, c'est de dire qu'on surveille la fonte des glaces. En réalité, toutes ces nations sont là pour planifier les investissements et la logistique pour forer. Ce sont tous ces paradoxes qui se mettent en route ; on voit les archaïsmes les plus violents cohabiter avec l'évolution technologique la plus radicale.


Vous travaillez souvent à partir de medias classiques pour exprimer quelque chose de beaucoup plus technologique. Mais, pour ce triptyque, vous avez inversé le mouvement. Notamment dans la forêt amazonienne, vous êtes parti de la civilisation première pour vous pencher sur la technologie comme moyen de diffuser la pensée.

C'est exactement ça. Les peuples premiers, qu'on prend pour des peuples archaïques, ne le sont absolument pas. Ils ont une connaissance de leur biodiversité incroyable. La communauté fonctionne selon un mécanisme très fin. Au moment où l'on cherche une manière de vivre en écologie avec le monde, un modèle existe déjà. C'est pour cette raison que ça me semblait important de les visiter. D'autant plus qu'eux, ayant conscience de ça, se sont médiatisés sur Internet et commencent à avoir une visibilité internationale. Ils adoptent les outils les plus modernes sans remettre en question leur mode de vie. Ils ne sont plus en dehors de l'Occident, ils sont occidentalisés à leur façon.
Mon travail questionne ça, parce que j'utilise les medias les plus anciens pour faire des choses en rapport avec les technologies. C'est un parti pris volontaire. Et je ne veux pas rentrer dans le propos erroné qui dit « nouvel outil, nouvelle forme d'art ». Les gens ne changent rien à leur mode de vie quand un nouvel objet technologique, tel que Facebook ou le téléphone portable, arrive. Le jeu des références évoluant, on a une nouvelle manière de s'exprimer.


Et l'Everest, c'est prévu pour quand ?

L'Everest c'est encore au stade du fantasme. Il y a plusieurs obstacles, et notamment l'obstacle budgétaire.


Justement, comment faites-vous pour réunir les fonds nécessaires à ce genre d'expéditions ?

J'ai eu beaucoup de chance parce que le Palais de Tokyo a manifesté la volonté de produire le projet « Amazonia ». Il y a aussi eu une sélection pour le projet polaire, et j'ai été choisi. Pour l'Everest, il n'y a rien de tout ça, et il faut que je trouve les fonds moi-même. C'est très compliqué parce que le budget est cinq fois plus important, il faut réunir 150'000 €. Un premier de cordée n'aura pas de mal à trouver des sponsors, un artiste c'est différent.

Le deuxième écueil est purement physique. La préparation physique est très difficile, il y a un très haut facteur de dangerosité. Je sais que je suis capable d'aller à 5'000 mètres sans masque parce que je l'ai fait en Equateur. Mais au delà de ça je n'en sais pas plus. Je vieillis, si je mets trop de temps à le faire je n'aurai plus les capacités physiques. Je ne connais pas l'issue et je n'ai pas de date. Mais si je trouve un sponsor demain, je le ferai.


Avez-vous pensé à une exposition globale pour présenter les œuvres résultant de ces voyages, voire, dans un premier temps, celles du diptyque ?

Aujourd'hui, les pièces ont toujours été montrées de manière isolée ou groupée, mais toujours sur un segment. J'aimerais bien monter une exposition qui rassemblerait toutes ces pièces là, mais je n'ai pas encore trouvé de lieu. Le marché de l'art étant ce qu'il est, les galeries sont dans des considérations de plus en plus commerciales. Elles ne montrent que mes peintures, tandis que les musées montrent moins mes peintures, mais plus mes objets et mes installations. Ca se partitionne bien, et donc pour rassembler les deux, c'est compliqué. C'est à réfléchir..."

ITW by Marion Thelliez

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